TPE sur la soie d'araignée

La soie d'araignée; les différents types de soie et leur production

Afin de bien comprendre le 3) de l’Introduction, et le postulat développé pour le choix de la soie de nos expériences, il est important de définir ce qu’est une araignée cribellate, et une soie cribellée.

La soie est fabriquée et stockée dans des glandes, dites « séricigènes ».
D’abord sont fabriquées les protéines du corps de la soie, puis celle de son enveloppe. Ces protéines sont sécrétées et stockées dans les glandes, sous forme de cristaux liquide (un cristal liquide est un liquide ayant ses molécules ordonnées), ce qui forme un fluide non newtonien, rhéoépaississant (c’est-à-dire dont la viscosité augmente en fonction du taux de cisaillement).
A la sortie de la glande séricigène, elle suit un canal en forme de S, qui se rétrécit progressivement. Lors de leur trajet, des ions (principalement hydrogène H+, sodium Na+ et potassium K+) séparent les protéines de leur solvant aqueux, ce qui confère une charge électrostatique à la soie (voir I. 2). Dans le canal, les protéines s’étirent en s’alignant les unes derrière les autres, ce qui produit un matériau souple et solide. L’eau restante est éliminée au niveau des fusules, pour transformer la soie en une fibre solide.

L’araignée tisse la soie sortant des fusules (voir schéma) par traction de celle-ci, la transformant en fibrille, d’environs 0,05µm de diamètre. L’araignée, en tissant ces fibrilles, en les combinant les unes aux autres, en les entrelaçant, obtient une soie d’environs 25 à 75µm de diamètre, très élastique.
Les propriétés de ce fil dépendront des proportions de fibrilles issues de glandes spécifiques. Mais la glande d’origine de la soie n’est pas le seul facteur déterminant de ses propriétés, la vitesse de tissage ayant par exemple un impact sur l’adhésivité. Chez l’épeire, la vitesse de sécrétion est d’environ 1 mm de soie par secondes. L’araignée effectue des mesures complexes d’angles et de mesures grâce à ses pattes (Vollrath 1987), et détermine ainsi quel type de soie est le plus approprié pour l'endroit où elle souhaite tisser.

Les deux types de soie, cribellée et écribellée, sont produits ainsi.
Il existe plusieurs sortes de glande séricigène ; une différence entre soie cribellée et soie écribellée réside dans le type de glande produisant la soie :

-Les glandes tubuliformes produisent la soie des cocons (sortie aux filières moyennes et postérieures).
-Les glandes ampullacées (mineures et majeures) produisent la soie des fils de soutien de la toile (structure) et de la spirale auxiliaire, ainsi que les facilement observables « fils de rappels » ou Dragline (sortie aux filières antérieures et moyennes).
Chez les Eresidae (voir Introduction.3) , elles sont assimilées à une structure appelée tube embryonnaire car cette structure est une sorte de glande ampullacée non évoluée (très schématiquement). Cette structure est pigmentée par de la mélanine, un pigment brun-jaunâtre ; il est à noter que ce pigment ne ressort nullement dans la soie de l’araignée.
-Les glandes aciniformes, produisent une soie servant à emmailloter les proies, à la toile spermatique et à la paroi extérieure du cocon (ou sac ovigère) (sortie aux filières moyennes et postérieures) (absentes chez les Eresidae, ce qui expliquerait peut-être pourquoi elles n’emmaillotent pas leurs proies, selon Lopez).
-Les glandes piriformes, servant à fixer la toile à un support (sortie aux filières antérieures).
-Les glandes agrégées (considérées comme propres aux Araneidae, Tetragnathidae, Linyphiidae et Theridiidae), produisent la « colle » de la spirale de capture, et s’associent avec la soie produite par…
-Les glandes flagelliformes pour ladite spirale, car le fil produit par celles-ci supporte la glue (spécifiques aux mêmes familles).
-Les glandes cribellaires : les plus petites connues (max 70 µm de diamètre), présentes uniquement chez les araignées cribellates (qui produisent une soie cribellée). Les Eresus ont plusieurs milliers de ces petites glandes, situées sous le cribellum (voir plus bas), légèrement déformées à cause de leur tassement.
Les glandes paracribellaires sont à peu près semblables, et sont une sorte de sous-catégorie des glandes cribellaires, situées non loin de ces dernières. Les glandes pseudo-flagelliformes, nommées ainsi à cause de leur ressemblance morphologique avec les glandes flagelliformes des Araneidae, sont aux nombres de deux et se terminent dans les filières postérieures, où une seconde paire de ces glandes se trouve, plus petite.

Les filières sont très musclées, ce qui leur assure une grande mobilité.
Selon les études de 1980 de Peters et Kovoor, la soie la plus utilisée des araignées cribellates provient des trois "sous-sortes" de glandes précédemment citées ; cribellaires, paracribellaires et pseudo-flagelliformes.

Schéma d'une toile orbitèle

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Schéma d'un cocon et d'une toile orbitèle; on ne distingue par vraiment la soie flagelliforme car elle est recouverte par la soie agrégée

Ainsi, la soie cribellée provient majoritairement des glandes cribellaires, glandes dont sont dépourvues les araignées écribellate, mais qui ont, en contrepartie, des glandes agrégées et flagelliformes.

La seconde différence entre la soie cribellée et la soie écribellée est le tissage ; en effet, les araignées cribellate peuvent réserver un traitement plus particulier à leur soie.

Le nom « cribellate » vient d’un organe situé au niveau des filières ; le cribellum (voir schéma).
Il s’agit d’une plaque, divisée en deux ou en quatre parties symétriques (deux chez Eresus), d’environs 500µm de haut. Il est parsemé de petites fusules, en nombre très élevé s’accroissant à chaque mue ; leur nombre peut grimper jusqu’à 40 000 chez une Stegodyphus adulte (genre voisin de Eresus ; même famille). Ces fusules sont en théorie perpendiculaire au cribellum, mais peuvent néanmoins s’agglutiner en petits groupes. C’est par ce cribellum que sort la soie des glandes cribellaires.
Toutes les araignées cribellates ont également un calamistrum ; rangée de poil sur le métatarse (6e et avant-dernier segment d’une patte) de la quatrième paire de pattes (IV ; pattes ambulatoires postérieures). Ces poils, petits, en « dent de peigne », au milieu de soies (les poils) normales, servent à filer la soie sortant du cribellum. La soie cribellée est donc dite « calamistrée ». En même temps, des fibrilles des filières postérieures et médianes viennent s’ajouter à celle calamistrées, afin d’obtenir un fil final aux propriétés de ses fibrilles plus ou moins conjuguées.

Filières d'Araneidae et d'Eresus

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Schématisation de l'ensemble de l'appareil filatoire chez la famille des Araneidae et chez le genre Eresus

La différence entre la soie cribellée et la soir écribellée est donc de l’ordre de la composition chimique car elles sont produites par des glandes différentes, et de l’ordre du tissage, car la soie cribellée est filée par un ensemble de petits poils, le calamistrum.

Soie cribellée

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Soie cribellée, très épaisse et serrée

Soie écribellée
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Soie écribellée, plus fine

Comme dit précédemment, notre postulat pour les expériences était que certaines propriétés observables à notre échelle étaient peut-être spécifique à la soie cribellée, par rapport à des résultats sur de la soie écribellée que l’on peut trouver dans des livres ou sur internet.

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